lundi 7 janvier 2013

Discrimination: moyens de preuve

Dans un arrêt récent  du 19 décembre 2012, la Cour de cassation juge que ni le droit au respect de la vie personnelle du salarié, ni le secret des affaires ne font obstacle à la mise en œuvre de l’article 145 du Code de procédure civile, permettant d’ordonner à l’employeur, en Référés et sous astreinte, la production des documents de nature à établir l’existence de discrimination à l’encontre d’un salarié. 

La preuve de mesures discriminatoires est souvent difficile à rapporter par un salarié, notamment en raison du régime de preuve en la matière et notamment du fait que toute action fondée sur une discrimination n'est recevable que si le salarié est en mesure de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence de celle-ci. 

Dans l’arrêt du 19 décembre 2012, deux salariées, qui s’estimaient victimes de mesures discriminatoires en matière de salaire, ont demandé, avant tout procès au fond et sous astreinte, la production par leur employeur des bulletins de salaire, contrats de travail et avenants de certains autres salariés de l’entreprise, ainsi que les tableaux d’avancement et de promotion au sein de la Société. 

Les salariées considéraient que la production de ces documents étaient nécessaires à la protection de leurs droits, en l’espèce établir, par une procédure au fond, la discrimination dont elles étaient victimes.

La Société conteste cette demande au motif que les salariées ne peuvent introduire en Référés, une telle demande, laquelle ne viserait qu’à obtenir la preuve de ce qu’elles avancent et alors même que les salariées n’auraient aucun élément de fait laissant supposer l’existence de discrimination à leur égard.

Le deuxième argument de l’employeur est le droit au respect de la vie privé des autres salariés, lesquels ne sont pas concernés par ce litige, ainsi que le secret des affaires.

La Cour de cassation rejette les arguments de la Société et confirme la décision des premiers juges qui a ordonné la production par l’employeur des documents demandés par les deux salariées. 

La Cour de cassation affirme donc clairement que ni le droit à la vie privé, ni le secret des affaires ne sont un obstacle à l’article 145 du Code de procédure civile, lequel vise non seulement la conservation de la preuve mais peut aussi tendre à l’établissement de la preuve.  

Cass.soc., 19 décembre 2012, n°10-20526 et n°10-20528.